MADAME DE LA PELTRIE (1603-1671) PREMIÈRE FUGUEUSE EN NOUVELLE-FRANCE

 

(Marie-Madeleine de Chauvigny/Madame de La Peltrie. Huile sur toile. Anonyme.17è siècle)

(Plaque en l’honneur de Madeleine de La Peltrie à l’intérieur de l’église Saint-Pierre-de-Bivilliers (Orne). 2016 Association Perche-Canada)

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Les débuts d’une colonie française en terre nord-américaine ne furent pas de tout repos et ont donné lieu à toute sorte de mésaventures que l’on croit réservées que pour nos téléséries actuelles. Mais prenez garde lecteur/lectrice car en ce 18 novembre 2018 soit à quelques trois cent quarante-sept ans de distance de sa mort, je vous présente sommairement Mlle Marie-Madeleine de Chauvigny mieux connue sous le nom de Madame de La Peltrie fondatrice, à sa manière, et à l’instar de Marie de l’Incarnation, du couvent des Ursulines de Québec.

Ce « de La Peltrie » vient d’un mariage sous la contrainte paternel avec un nommé Charles de Gruel, seigneur de La Peltrie. En effet, la jeune fille se vit obligée de prendre époux car Monsieur son père désirait, pour elle, le genre de bon mariage surtout pour sa fille cadette. Elle donna naissance à une enfant morte au berceau et ce triste événement, coutumier à l’époque, fut suivi de la mort de son mari en 1625.

Marie-Madeleine de Chauvigny qui vit le jour à Alençon en 1603 devint ainsi veuve à l’âge de 22 ans. Elle pensait pouvoir reprendre sa liberté afin de combler son désir d’une vie cloîtrée ou qui s’y apparente. Or, c’est par la lecture de la Relation des Jésuites de 1635 doublé de l’appel du père Le Jeune qu’elle commence à ressentir un certain attrait pour une vie de missionnaire laïque en Nouvelle-France. Mais deux obstacles se dressa devant elle.

D’abord son père tenait toujours à bien la marier et cherchait un successeur au seigneur de La Peltrie. Marie-Madeleine qui, soit dit en passant, avait hérité d’une grande fortune et d’un bon patrimoine du premier mariage voulait encore moins d’un second. C’est ainsi qu’elle imagina un stratagème par lequel elle feindrait le projet d’un mariage blanc afin de calmer les ardeurs de Monsieur son père.

Elle alla rencontrer une connaissance du nom de Jean de Bernières, qui faisait office de trésorier de France dans la ville de Caen. Ce Jean de Bernières était un homme de grande réputation morale et spirituelle. Il fut fondateur de l’Ermitage de Caen d’où il dirigea des session de vie spirituelle. Monsieur de Bernières comprenant la situation de notre jeune veuve accepta de jouer le jeu.

Heureusement, doit-on dire malgré tout, Monsieur le père mourut et le stratagème aussi. Puis un problème de santé vint compliquer les choses. En effet, elle fut terrassée par la maladie. Les médecins la donna pour presque morte et se contentaient de visites de politesse auprès de la malade. Cette fois-ci, loin d’elle l’idée d’un stratagème pour se sortir de là. Elle passa plutôt par saint Joseph lui promettant suivant une sainte guérison d’aller en Canada.

Aussitôt la guérison obtenue, elle passe par Paris. Elle y rencontre Vincent de Paul et le père Condren. Puis, un père jésuite prend le relais, il s’agit du père Poncet. De ceci en cela, elle se rend dans la ville de Tours (France) rencontrer l’évêque du lieu ainsi que Marie Guyart , mieux connue sous le nom de Marie de l’Incarnation. Les deux femmes sont sur la même page géographique et missionnaire: le Canada et un couvent. Rien d’autre.

Puis on prépare les navires. Mme de la Peltrie y amène sa jeune servante de 19 ans Charlotte Barré qui incessamment deviendra la première professe du monastère des Ursuline de Québec et qui sera connue sous le nom soeur saint Ignace. Tout ce beau monde arrive et débarque à Québec le 1er août 1639 pour entre autre fonder le couvent des soeurs de Sainte Ursule de Québec en terre d’Amérique française.

Puis les années passant, nous nous retrouvons en 1641-1642 alors qu’arrive à Québec Maisonneuve, Jeanne Mance et la première recrue pour procéder à la fondation de la colonie de Ville-Marie sur l’Île de Montréal. On sait que l’équipage fut retenu quelques mois à Québec, le temps de pouvoir reprendre la navigation vers Montréal.

Et vlan, coup de théâtre. Madame de La Peltrie décide de faire faux bond à Marie de l’Incarnation et aux Ursulines. Au dire même du Dictionnaire biographique du Canada, Madame de La Peltrie fugue à Ville-Marie, au printemps de 1642, pour être auprès de Maisonneuve et de Jeanne Mance dont elle apprécie la compagnie.

Elle revient dix-huit mois plus tard auprès des Ursulines alors au bord de la catastrophe financière. En 1646, elle demande d’être novice dans la compagnie des soeurs de Sainte Ursule. Mais la vie du cloître total ne lui convenait pas. Elle repris donc sa liberté d’aller et venir à sa guise tout en vivant au cloître et en respectant l’ensemble des règles monastiques.

Au fond, Marie-Madeleine semble avoir été beaucoup plus proche d’une Jeanne Mance que d’une Marie de l’Incarnation. En ce sens qu’elle se considérait comme une laïque engagée et libre de ses mouvements. Au couvent de Québec, elle fut pendant dix-huit ans lingère. Elle s’occupait de la vaisselle, du ménage, du balayage et jouait aussi à l’infirmière en pansant les plaies des différents blessés. Sans oublier la catéchisation des jeunes amérindiennes et la visite de réconfort auprès des malades.

Le 12 novembre 1671, Madame de La Peltrie est frappée d’une pleurésie qui lui sera fatale. Elle mourut le 18 novembre après trente deux ans de vie de missionnaire laïc au service de la Nouvelle-France et de l’Église. Elle fut inhumée le lendemain dans la chapelle des Ursulines. On remit son coeur comme relique aux Jésuites.

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